lundi, décembre 03, 2012

CHILI : PEDRO CAYUQUEO FACE À L’ARBITRAIRE

PEDRO CAYUQUEO FACE À L’ARBITRAIRE : LE DÉNI DE JUSTICE AU NOM DE LA CENSURE

Tribune publiée le 28 novembre 2012 sur les sites Bío Bío Nacional  et The Clinic 

par Benoît Hervieu, Bureau Amériques de Reporters sans frontières 



Rumeur ou mauvaise plaisanterie ? La détention, le 24 novembre dernier dans la région de Temuco, du journaliste indigène mapuche Pedro Cayuqueo Millaqueo s’apparentait, de prime abord, à un mauvais rêve. Triste hasard d’un contrôle routier, vraiment ? Alors qu’il circule ce soir-là en voiture avec sa fille et deux de ses neveux – tous trois mineurs – aux environs de la commune de Teodoro Schmidt, le directeur des revues Azkintuwe et Mapuche Times est intercepté par deux carabiniers qui invoquent un mandat d’arrêt à son encontre. L’affaire est ancienne et a déjà été jugée mais peu importe. Pedro Cayuqueo devra attendre minuit avant de repartir libre. Le « mauvais rêve » relève à la fois du scandale judiciaire et de la persécution politique caractérisée. L’un révèle l’autre.

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LE JOURNALISTE INDIGÈNE MAPUCHE PEDRO CAYUQUEO MILLAQUEO DIRECTEUR DES REVUES AZKINTUWE ET MAPUCHE TIMES 

REPÈRE
CHILI CHEZ LES MAPUCHES, UNE GÉNÉRATION D’INTELLOS
LE RECENSEMENT DE 2002 INDIQUE QUE LES MAPUCHE, LITTÉRALEMENT « PEUPLE DE LA TERRE » EN MAPUDUNGUN, SONT PRÈS DE 600 000. SELON PEDRO CAYUQUEO, DIRECTEUR DE LA REVUE MAPUCHE AZKINTUWE, CRÉÉE EN 2003, « ON ESTIME À 2 000 LE NOMBRE DE JEUNES MAPUCHE DANS LES SEULES UNIVERSITÉS PUBLIQUES ET PRIVÉES DE TEMUCO. ILS SONT PLUSIEURS CENTAINES D’AUTRES SUR LES CAMPUS ET DANS LES FACULTÉS DE CONCEPCIÓN, DE VALDIVIA, D’OSORNO ET DE PUERTO MONTT. »
Le scandale judiciaire dure depuis plus d’une décennie. Pedro Cayuqueo avait écopé, en octobre 2003, d’une peine de 61 jours de prison assortis d’une amende pour « usurpation de terrain » et « recel de vol de bois », en 1999, lors d’une occupation de terres spoliées aux communautés mapuches et attribuées à l’entreprise agroindustrielle Forestal Mininco. Incarcéré une première fois en 2004 et purgeant le temps de peine prononcé, le journaliste subit également la confiscation de deux cents exemplaires d’Azkintuwe – revue qu’il a fondée après l’occupation de terres de Traiguén – et jamais rendus depuis. Première incarcération. Et première censure.