mercredi, février 13, 2008

LA PIÈCE « LA MORT DE MARGARET THATCHER » PROVOQUE UNE POLÉMIQUE À LONDRES

Margaret Thatcher visite Pinochet 
durant son arrêt à Londres.
Photo AP
Où étiez-vous le jour de la mort de Kennedy ou de la princesse Diana ? Tout le monde est capable à répondre à cette question.
Le jeune dramaturge britannique Tom Green est persuadé que le décès de Margaret Thatcher, légendaire premier ministre de 1979 à 1990, provoquera des émotions de cette nature. C'est le thème de sa dernière pièce, La Mort de Margaret Thatcher (The Death of Margaret Thatcher) à l'affiche du Courtyard Theatre, une salle off nichée dans le quartier branché de Hoxton, dans le nord de Londres.

UN CERCUEIL DE BOIS CLAIR

"J'ai 37 ans. Je suis définitivement un enfant de la génération Thatcher. Si vous n'étiez pas l'un de ses admirateurs, elle était un monstre, même si ce n'est plus le cas de nos jours. La force des convictions à son égard est partie intégrante de son statut d'icône" : Tom Green ne comprend pas la formidable polémique déclenchée par son spectacle.

Les milieux conservateurs ne décolèrent pas contre cette satire de leur idole. "Une oeuvre dégueulasse crachant sur la tombe de Mme Thatcher", s'est écrié le Daily Mail, croisé du thatchérisme pur et dur. Sur le ton ironique, l'ancien ministre de Mme Thatcher, Lord Tebbit, estime que "la pièce aurait dû s'appeler Mmeen imaginant son retour au 10 Downing Street".

Thatcher est bien vivante


Quant à la presse de gauche, elle dénonce la légèreté du script, jugé trop respectueux envers son sujet par rapport aux récentes pièces au vitriol de David Hare et de Nicolas Hytner sur la politique de Tony Blair en Irak.
Toute l'action s'articule autour d'un cercueil de bois clair, recouvert de la robe bleu foncé de l'ordre de la Jarretière, dans lequel repose la Dame de fer.

L'impact de son décès sur le pays est analysé via les réactions contrastées des quatre principaux personnages : une présentatrice télé qui voit dans cette disparition la chance de sa vie, un cadre en thérapie, un croque-mort d'extrême droite, et un ex-mineur qui marche depuis Sheffield sur Londres pour venir protester devant sa sépulture. Confronté aux divisions de l'opinion, le gouvernement est contraint de lui refuser des obsèques nationales.

Aujourd'hui âgée de 82 ans, malade, "Mrs T." s'est totalement retirée de la vie politique. Dix-huit ans après avoir été chassée du pouvoir par ses propres ministres, elle connaît une deuxième vie, comme l'atteste le récent hommage du travailliste Gordon Brown à son action volontariste.

CRUEL CERBÈRE

Les artistes britanniques, en revanche, n'ont jamais débordé d'affection pour "Maggie". En 1980, la pièce A Short, Sharp, Shock, de Howard Brenton et Tony Howard, avait déjà défrayé la chronique en présentant tour à tour la première femme à la tête d'un gouvernement britannique comme une mégère, une femme de ménage, un sergent-chef et un cruel cerbère. En 1988, le chanteur Morrissey, dans Margaret on the Guillotine, hurlait sa haine : "Quand allez-vous enfin mourir ?"

Ces provocations avaient laissé Mme Thatcher de marbre. Le théâtre, comme tous les arts d'ailleurs, l'ennuyait profondément.

Marc Roche