lundi, juin 04, 2007

La Légion d’Honneur pour Servet Martinez


Mathématicien chilien de renom, Président de l’Académie chilienne des Sciences, Servet Martinez, depuis son doctorat à Jussieu (Paris) en 1980, incarne la coopération scientifique entre la France et le Chili. La France vient de le distinguer en lui remettant la Légion d’Honneur

Quand Servet Martinez était lycéen à l’Instituto nacional, le lycée public des bons élèves, il a lu Le petit chose d’Alphonse Daudet. C’est dire si ce temps est lointain, quand on sait que le Français n’est quasiment plus enseigné au Chili. N’empêche que ce Petit chose l’a mené loin. Et sans lui, la coopération scientifique entre la France le Chili n’en serait peut-être pas là. Il a été l’un des premiers, à la fin de ses études d’ingénieur, en 1975, à obtenir une bourse de la coopération française, pour faire un doctorat à Paris VI-Jussieu, la Mecque des probabilités, sa spécialité.
"La France a été parmi les rares pays à comprendre que le Chili était vivant, qu’il ne se résumait pas à son gouvernement, qu’il y avait des esprits libres et critiques en particulier dans la communauté mathématique et scientifique. L’Ambassade nous a aidés, parfois en contournant les carcans gouvernementaux", reconnaît-il dans un Français précis, malgré une prononciation toute personnelle, qui autrefois l’a mené à "Lyon" quand il disait "Dijon".

Spécialiste des probabilités
Rentré au Chili en 1980, il a gardé des liens étroits avec les facultés françaises. "Entre 1983 et 1995, j’ai passé tous mes étés, janvier, février, en France. Autrement dit , je n’ai pas vu le soleil pendant des années", se souvient-il . Et à qui les mathématiques semblent quelque chose d’abstrait, qui ne valent pas le sacrifice d’une seule journée de vacances, il explique modestement que les probabilités servent, par exemple, à comprendre des phénomènes physiques. Elles s’appliquent autant à l’économie (les marchés financiers) qu’à l'industrie minière (pour briser les roches efficacement) ou à la "prévision" des tremblements de terre. Au Chili, elles ont servi aussi à prévoir comment la maladie des pins "risquait" de se propager aux autres arbres. L’assurance, la banque sont d’autres grands domaines où l’on a besoin de calculer des "risques".
Aujourd’hui, la France n’en n’est plus à "aider" les scientifiques Chiliens, les relations sont égalitaires. Près de 300 chercheurs français viennent au Chili chaque année et presque autant de scientifiques chiliens partent en France. Servet Martinez a pris, à sa création, la direction scientifique du Centre de modélisation mathématique. Autre bel exemple de coopération, le centre a été créé par l’université du Chili, en partenariat avec le CNRS français. Il est en plus président de l’Académie des sciences du Chili.
Parce qu’il incarne les trente ans de coopération scientifique entre les deux pays, Servet Martinez va recevoir cette année la Légion d’Honneur des mains de l’Ambassadeur de France. Il s’en dit "fier et surpris". Voilà donc au moins, une "dynamique de système" qu’il n’avait pas calculé !